Prétexte à un hommage au maître Marius Petipa, le Casse-Noisette de John Neumeier (1942- ), crée pour le Frankfurt Ballet en octobre 1971, présente un contexte parfaitement étranger à la célébration de la nuit de Noël. Campée dans le milieu de la danse classique, l'histoire met l'accent sur les ambitions de danseuse d'une jeune fille (Marie) dont la sœur aînée est déjà danseuse étoile pour le maître chorégraphe Drosselmeyer. Le casse-noisette, que le fiancé de sa sœur lui offre pour son anniversaire, se matérialise alors pour permettre à la jeune Marie d'accéder à son rêve dans une danse avec lui.
En 1997, c'est l'Opéra de Saint-Étienne qui commande à Thierry Malandain une nouvelle chorégraphie de Casse-Noisette. Encore une fois, une relecture s'impose, relecture que fait Malandain en se replongeant dans le récit d'Hoffmann, ressuscitant l'épisode de la noix dure, qui met en scène une princesse que seule la découverte d'une noix singulière peut sauver. Évidemment, c'est un cousin de Drosselmeyer (alors mage à la cour du roi dans cette version) qui la possède. Il l'a casse alors (remplissant son office de casse-noisette) et remet à la princesse l'amende qui la guérit.
Maurice Béjart (1927-2007) signe quant à lui une chorégraphie très épurée, plus personnelle, présentée au Théâtre Regio, à Turin, en octobre 1998, dans laquelle c'est la maman décédée d'un enfant qui reprend vie au cours de la nuit de Noël, alors qu'il est assis tristement près d'un sapin dégarni. Tout s'anime alors autour de lui et l'espace d'une nuit, il retrouve l'amour et le bonheur… Rien n'est impossible !
Plus que l'objet fétiche lui-même, c'est la magie qu'inspire la musique de Tchaïkovski qui anime les cœurs et les espoirs. À la lumière de la version de Béjart ou de celle de Neumeier, par exemple, il est indéniable que l'on peut construire la fable en dépit des personnages d'origine et conserver malgré tout la force et le fil conducteur qui ont fait la symbolique du ballet Casse-Noisette.
Malgré les nombreuses lectures qu'il a déjà inspirées, le ballet Casse-Noisette reste une matière féconde que les grands danseurs et les illustres chorégraphes du monde entier adorent remanier encore et encore. Spectacle de vaste envergure, Casse-Noisette monopolise généralement un effectif des plus impressionnants.
Pour la seule représentation de l'Opéra Bastille en 1997, chorégraphiée par Noureev, le ballet a retenu les services de 66 danseurs sur scène, 33 petits "rats", 20 figurants, 79 musiciens ainsi qu'une cinquantaine de techniciens. Et parions que ce ballet féerique n'a toujours pas fini d'inciter les plus fous, les plus audacieux, les plus extravagants des créateurs du monde de la danse. Aussi, en attendant les excentricités de futurs Casse-Noisette, revisitons avec bonheur ce ballet dont l'intemporalité ne nous lassera peut-être jamais…