À l'époque, Son Excellence le gouverneur Charles Lawrence (1709-1760) fait approuver par Londres des mesures plus que cruelles afin de bannir les habitants francophones d'Acadie.
Non seulement on leur retire tous leurs biens, les obligeant à partir avec leur seul argent et quelques pièces de mobilier, mais l'on menace les rebelles d'abattre des membres de leur famille s'ils refusent d'obtempérer…
L'Acadie, d'abord colonisée par les Français dès 1604, constitue un territoire de choix de par sa position stratégique.
Bordant le sud du fleuve Saint-Laurent, il s'agit d'une place forte, depuis longtemps convoitée par les Anglais.
À la signature du traité d'Utrecht, en 1713, la couronne britannique met la main sur le territoire acadien, acceptant toutefois de ne pas déloger le peuple francophone s'il fait la promesse d'observer la neutralité dans les conflits franco-anglais.
Mais les colons anglais briguent ces terres si fertiles. Des soupçons flottent bientôt sur les Acadiens, on leur présume des accointances avec les Français et les Amérindiens qui représentent une menace constante pour la flotte britannique.
Il n'en faut pas plus pour que l'édit de leur déportation soit signé et mis à exécution illico.
Dans le plus grand fracas, à travers les cris de détresse et le désespoir de ces pauvres gens ruinés, l'armée anglaise force à l'embarcation tous les malheureux qu'elle attrape.
On les charge sur des bateaux en mauvais état, on les dirige sur les États-Unis qui les refusent ou les réduisent à l'esclavage.
On incendie leur chaumière, on s'empare du bétail et des biens qu'ils n'ont pu emporter. Les fuyards apprenant la menace qui pèse sur leurs proches, décident de se livrer.
Certains sont acheminés vers l'Angleterre, leur sort n'est guère mieux.
Plusieurs périssent en mer après le naufrage de deux des mauvais bateaux qui doivent les amener à bon port.
La plupart de ceux que l'on tente d'éparpiller sur la cote américaine migre finalement vers Haïti (alors appelée Saint-Domingue). Les autres qui se trouvent au Canada sont tantôt décimés par la faim et le froid, tantôt terrassés par les épidémies.
De cette époque éprouvante, on note aussi un nombre important d'enfants soustraits à leur famille pour être offerts en adoption à des familles américaines.
En tout, certaines sources historiques évaluent les pertes de vies humaines entre 7500 et 9000, depuis 1755 jusqu'à 1763.